Santé et Sécurité

Le blues du lendemain de veille : voici ce qui se produit dans votre cerveau

L’alcool nuit au processus de formation des souvenirs, ce qui crée de la confusion et de l’incertitude au lendemain de la veille. Photo: Juan Pablo Serrano Arenas / Pexels

Amy Reichelt, Western University

Vous êtes-vous réveillés avec une pointe d’anxiété au lendemain du réveillon ? Après deux semaines de célébrations de Noël bien arrosées, il est possible que vous souffriez de l’angoisse post-cuite, un cocktail d’anxiété et de gueule de bois que les anglophones appellent « hangxiety » (contraction des mots hangover pour gueule de bois et anxiety pour anxiété).

Je suis chercheure en neurosciences et je m’intéresse aux effets de l’alcool et de la nourriture sur le fonctionnement du cerveau. Voici comment la consommation d’alcool peut provoquer de l’anxiété après l’effet euphorisant.

De la téquila aux endorphines et la dopamine

Les boissons alcoolisées – vin, bière ou spiritueux – perturbent l’équilibre des neurotransmetteurs dans le cerveau. L’effet peut en être agréable sur le moment, mais beaucoup moins le lendemain.

Cet effet agréable est dû au fait que l’alcool stimule la production d’endorphines, ces opioïdes naturels fabriqués par le cerveau.

L’alcool nuit à la prise de décision, au contrôle de soi ainsi qu’à la mémoire. Photo: Isabella Mendes / Pexels

Il augmente aussi la production de dopamine, activant le système de récompense du cerveau – qu’on appelle aussi le système mésolimbique. La production de dopamine renforce les comportements qui ont mené à cette euphorie, si bien que ce petit coup de téquila nous donne envie d’en prendre un autre !

Mais l’alcool ne fait pas qu’activer notre système de récompense. Il perturbe aussi l’activité des neurotransmetteurs qui contrôlent le fonctionnement du cerveau. L’imagerie cérébrale prouve que l’alcool diminue l’activité du cortex préfrontal et du lobe temporal, des centres qui régissent la prise de décision, le contrôle de soi et la mémoire.

Anxiété, malaise et stress

L’alcool augmente l’activité inhibitrice des récepteurs GABA (acide gamma-aminobutyrique). Les récepteurs GABA réduisent les activités des neurones et l’alcool exagère cet effet. Un taux élevé de GABA favorise les sentiments de relaxation et de calme, qui nous rendent plus sociables et moins stressés.

Consommé en grande quantité, l’alcool bloque aussi le système glutamique. Le glutamate est le principal neurotransmetteur d’excitation du cerveau, et il joue un rôle important dans la constitution des souvenirs et des émotions.

L’équilibre entre le GABA et le glutamate est indispensable pour permettre à notre cerveau de fonctionner de façon optimale. L’alcool rompt cet équilibre. L’alcool est un agent dépressif pour le système nerveux central, car il augmente le caractère inhibitif du GABA tout en diminuant le caractère d’excitation du glutamate.

Quand notre cerveau perçoit un haut niveau d’acide gamma-aminobutyrique en conjonction avec un faible taux de glutamate, il réagit rapidement afin de compenser ce déséquilibre. C’est cette réaction compensatoire, menant à une baisse du taux de GABA et à une augmentation du taux de glutamate, qui provoque le sentiment d’anxiété, d’inconfort et de stress qui se produit le lendemain.

Oh non… J’ai pas fait ça ?

Après plusieurs boissons alcoolisées, la transmission de glutamate est ralentie dans le lobe temporal médian, la région du cerveau qui contrôle la mémoire.

Le lendemain matin peut révéler des souvenirs pour le moins choquants.

Les trous de mémoire provoqués par l’alcool sont causés par l’augmentation rapide du taux d’alcool dans le sang, résultat fréquent d’une cuite, qui se définit par l’absorption de quatre boissons alcoolisées pour une femme, et cinq pour un homme, dans un délai de deux heures.

Lorsque l’on est sobre, les souvenirs se constituent dans le cerveau après que l’information ait été transmise de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme. Ce processus s’intitule consolidation de la mémoire. C’est ainsi que les souvenirs sont récupérés et mémorisés.

L’alcool entrave cette fonction, ce qui mène à un état de confusion et de doute le lendemain d’une cuite. Le souvenir confus de la soirée précédente (C’est pas vrai, j’ai vraiment fait ça ?) peut provoquer une forte anxiété.

L’alcool a également un impact énorme sur la qualité du sommeil, car il réduit la phase de sommeil paradoxal, celle où se produisent les rêves. Cette phase est indispensable à l’inscription des souvenirs à long terme. Donc une mauvaise nuit de sommeil à la suite d’une beuverie risque de « fragmenter » les souvenirs.

Les timides souffrent davantage

Ce n’est pas tout le monde qui souffre de l’angoisse de la gueule de bois, mais certains en sont plus affectés que d’autres. Selon une récente étude, l’intensité de l’expérience varie en fonction des traits de personnalité. Les timides seraient plus anxieux après une cuite que les gens moins inhibés.

Comment éviter l’angoisse post-cuite

La seule façon de s’assurer de ne pas subir cette expérience est de ne pas consommer d’alcool.

Le lendemain de la veille peut comporter un doux mélange de mal de tête et d’inquiétude. Photo: Olichel / Pixabay

Par contre, en limitant sa consommant d’alcool, on peut réduire les effets de l’angoisse post-cuite. Espacez le boissons en buvant de l’eau, et vous éviterez l’augmentation rapide du taux d’alcool dans le sang, qui affecte votre mémoire. De plus, vous resterez hydraté, ce qui vous évitera le mal de tête du lendemain.

Amy Reichelt, BrainsCAN Research Fellow at Western University’s Schulich School of Medicine & Dentistry, Western University

La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation.

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